Le 30 avril 2012 en Utah, je découvrais à Fry Canyon, à proximité du motel du même nom, un spécimen de Sclerocactus parviflorus d’une taille inhabituelle. Encore aujourd’hui, ce spécimen me semble avoir été le parviflorus avec la plus haute tige qu’il m’a été donné d’observer dans la nature. Une tige haute de 40 cm au moins sinon plus, tant il était difficile de mesurer correctement cette hauteur. Il était bien caché et difficile d’accès sous les rameaux desséchés d’un antique genévrier. Photographié ci-dessous, ce spécimen poussait près du croisement de la route 95 et de la piste en terre battue menant au Red Rock Plateau. Il était l’un des très nombreux « terrae-canyonae » à fleurs jaune que l’on rencontre autour de Fry Canyon et le long de la Wingate Mesa.
Je suis repassé à Fry Canyon en avril 2016. Ce « terrae-canyonae » remarquable n’existe plus. La route 95 et ses accotements ont fait l’objet de travaux de réfection et les proches abords du motel où poussait ce spécimen avec d’autres exemplaires ont été également « nettoyés ». Le sol est désormais raclé sur plusieurs dizaines de mètres et il n’y a plus rien à voir, sauf à emprunter les rares sentiers qui partent de cette route 95 et à y découvrir d’autres parviflorus mais de taille bien moindre.
Avec cette disparition, les autres spécimens de parviflorus montrant les plus hautes tiges qu’il m’a été donné de voir dans la nature ont été rencontrés en mai 2014 dans le parc de Canyonlands, le long de la route menant au point de confluence (Confluence Overlook) des rivières Colorado et Green. Des tiges qui mesuraient entre 30 et 35 cm de hauteur. En Arizona, en Utah, au Colorado ou au Nouveau-Mexique, et parce qu’il s’agit de l’espèce de Sclerocactus la plus répandue, les spécimens de parviflorus de grande taille ne sont pas rares. Les hauteurs de tiges de 25, 30, 35 cm s’accompagnent le plus souvent de diamètres de tiges supérieures à 10 cm (des diamètres qui peuvent atteindre 14,5 cm selon Flora of North America).
Dans le genre Sclerocactus (stricto sensu), seules les espèces parviflorus et polyancistrus montrent les plus hautes tiges, susceptibles d’atteindre 40 à 45 cm. Les tiges de l’espèce cloverae avoisinent tout au plus les 20 à 25 cm. Viennent ensuite les tiges des espèces blainei et spinosior dont les spécimens âgés peuvent mesurer de 15 à 20 cm de hauteur. Toutes les autres espèces du genre présentent des hauteurs maximales de tiges inférieures à 15 cm.
Curieusement, c’est au cours de ce même périple 2016, quelques jours après la triste découverte de la disparition de ce vénérable parviflorus, que j’ai pu en voir d’autres d’assez grande taille. Le 27 avril précisément, le long de la frontière entre Utah et Arizona. J’étais allé ce jour-là à la rencontre de personnes autochtones des Réserves Indiennes situées aux environs de Page et de Kanab/Fredonia. Je souhaitais rencontrer des botanistes ou des responsables de ressources naturelles dans l’espoir qu’ils me guident et m’aident à trouver de beaux spécimens de Sclerocactus au sein de leurs territoires dont l’accès peut être limité.
Le fait qu’un étranger vienne à leur rencontre à propos de cactées présentes sur leurs terres avait de quoi les surprendre. Qu’il leur montre, en plus, son site internet consacré à ces cactées ne pouvait que les intéresser. J’ai été partout bien reçu et écouté, avec bienveillance et attention, et je les en remercie une fois encore. Grâce à eux, j’ai découvert quelques spécimens de parviflorus auxquels personne ne portait plus attention. Après avoir emprunté des pistes improbables et chaotiques, je pouvais ainsi observer aux alentours de Fredonia, sur les pentes d’une petite colline à la végétation très clairsemée, deux spécimens de parviflorus à fleurs rose. Des parviflorus déjà de grande taille et de fort diamètre.
Le plus gros et le plus grand de ces spécimens mesurait, hors épines, près de 25 cm de hauteur pour presque 12 cm de diamètre. C’était un très beau spécimen. Il portait douze boutons floraux. Les premières fleurs commençaient à s’épanouir, mais bien timidement car ce 27 avril était une journée sans soleil. Un ciel triste et grisâtre, d’une couleur presque aussi sombre que celle de la terre dans laquelle poussait ce cactus. Le second, à la tige haute de 21 cm, mais d’un diamètre de presque 12 cm lui aussi, portait moins d’une dizaine de boutons floraux encore à s’épanouir. Ces deux spécimens avaient peut-être 25 à 30 ans d’âge et j’étais un peu désespéré de devoir les photographier sans soleil. Malgré cela, ce 27 avril allait rester une journée d’heureuses et instructives découvertes.