Située au Nevada entre 1500 et 1600 mètres d’altitude, la Dry Lake Valley se trouve dans la zone de distribution de Sclerocactus blainei (= Sclerocactus spinosior ssp. blainei). Cette vallée est un ancien bassin endoréique, c’est-à-dire un bassin fermé dont les eaux (de pluie et d’infiltration) ne débouchent pas sur la mer. Un bassin depuis bien longtemps asséché à l’exception de quelques zones marécageuses dans sa partie nord. Le sol est essentiellement alluvial et limoneux, ce qui en fait toute sa richesse.
Les photographies ci-contre et ci-dessous ont été prises le 9 mai 2011, une journée passée à la recherche de spécimens de cette espèce blainei. Recherche qui s’est avérée plus difficile que prévue, et pas seulement en raison des humeurs du ciel apportant localement ce jour-là de la neige !
De toutes les espèces du genre Sclerocactus, cette espèce m’a été la plus difficile à trouver. Et bien d’autres journées de recherche m’ont été nécessaires pour pouvoir observer (enfin et pas dans cette vallée !) quelques spécimens dans la nature. Deux types de difficultés peuvent rendre éprouvantes ces recherches de plantes. D’abord la dimension des paysages. Même si, sans indication précise de site, on s’estime bien renseigné sur une zone géographique où peuvent (doivent) se rencontrer des spécimens, on est très souvent surpris, une fois sur place, de se retrouver au milieu d’étendues démesurées. La dimension des paysages n’est jamais facile à appréhender, comme ce fut le cas pour cette Dry Lake Valley. Dans le temps forcément limité d’un voyage, il s’avère bien impossible d’arpenter seul minutieusement tout le terrain qui se présente à vous. C’est assez décourageant. Et quand, en plus, le climat s’en mêle…
Ce ne sont donc pas tant les accidents du terrain qui posent problème, mais bien davantage les distances impressionnantes qu’il faut parcourir. En faisant appel à ses connaissances et à sa documentation, des choix « stratégiques » de recherches vont alors orienter ces dernières : spécimens observés à quelles altitudes, sur quelles natures de sol, sur quels types de terrains préférentiels ? Avec quelle exposition : plutôt versants sud ou plutôt versants ouest ? Avec quelles plantes accompagnatrices ? …
C’est ensuite la plante elle-même qui peut être très difficile à trouver. C’est le cas de Sclerocactus blainei. On peut passer à côté d’un spécimen sans même l’apercevoir. En cause sa petite taille bien sûr, mais surtout sa couverture d’épines et, notamment, certaines d’entre elles très particulières. Dans le genre Sclerocactus et sur des plantes matures, les épines de ces blainei ne sont pourtant pas les plus nombreuses par aréole. Seulement de 10 à 15 au total alors qu’elles peuvent être le double sur Sclerocactus polyancistrus ou près du double sur Sclerocactus parviflorus. Mais, entre épines radiales et épines centrales, leurs agencements, formes et couleurs, procurent à ces cactées un remarquable camouflage dans leur milieu naturel. La photographie ci-dessous donne la mesure du phénomène. En imaginant se tenir à quelques mètres de distance du spécimen pourtant assez dodu qu’elle montre, on conviendra que sa détection sur le tapis végétal s’avère extrêmement difficile. Indéniablement et par expérience, les spécimens de Sclerocactus blainei ne sont jamais faciles à apercevoir.
Leurs épines montrent plusieurs formes. Sur les six épines centrales par aréole que compte cette espèce, les trois épines centrales à section plate font sa particularité et son originalité. Elles montrent une section mince comme du papier. Une minceur qui amène ces épines à se trouver plus ou moins torsadées sur presque toute leur longueur, de 4 à 6 cm habituellement, comme peut l’être un ruban.
Ces épines centrales papyracées sont pour deux d’entre elles des épines latérales, de couleur blanche, beige, rouge ou brun rougeâtre (Flora of North America). Elles accompagnent une troisième épine nettement érigée qui pointe vers l’apex (épine adaxiale), de couleur blanche mais parfois grisâtre. C’est la plus longue épine de toutes celles portées par Sclerocactus blainei. Sur les spécimens matures, ces trois longues épines centrales papyracées s’apparentent alors remarquablement aux feuilles fines et étroites, torsadées et séchées, de plusieurs graminées vivaces des genres Bouteloua ou Hilaria notamment. La couverture d’épines de ces cactées leur permet de se fondre dans le fouillis des herbes basses qui les accompagnent au plus près dans leur environnement naturel. Pour preuve, cette autre photographie ci-dessous d’un spécimen de blainei tout juste repérable alors qu’il ne se trouve qu’à une vingtaine de centimètres seulement de l’objectif.