Sclerocactus parviflorus « terrae-canyonae »

La photographie ci-dessus a été prise le 25 avril 2009 dans le comté de San Juan en Utah, le long d’une piste longue de 19 kms conduisant aux rives de la rivière San Juan. Bien qu’un peu sinueuse et agrémentée de nombreux dos d’âne, c’est une piste sans obstacle et roulante. Elle longe les Red House Cliffs qui dominent un paysage plat et désertique, d’une couleur uniforme rouge orangée. Ce jour-là, le vent du nord soulevait une fine poussière qui venait colorer les moindres recoins de mes vêtements et de mon véhicule.

J’ai aperçu ces spécimens de Sclerocactus de loin car leurs tiges s’élevaient nettement du sol. Il s’agissait bien de terrae-canyonae caractérisés par leurs fleurs de couleur jaune que le vent froid n’avait pas empêché de s’ouvrir assez largement. Ces spécimens étaient tous âgés compte tenu de la taille des tiges. Je me souviens avoir été étonné de les trouver disséminés dans ce paysage sans relief, en léger contrebas de la piste, alors que je les recherchais de l’autre côté de celle-ci, au plus près des Red House Cliffs.

Les Sclerocactus parviflorus « terrae-canyonae »seraient de lointains hybrides entre Sclerocactus parviflorus et Sclerocactus whipplei. L’appellation Sclerocactus terrae-canyonae apparait en 1979 avec une première description du botaniste Kenneth D. Heil dans la revue Cactus and Succulent Journal (Los Angeles), 51 :25-30. En 1994, Sclerocactus terrae-canyonae devient Sclerocactus parviflorus ssp. terrae-canyonae dans un nouvel article de Kenneth D. Heil et J. Mark Porter, « Sclerocactus (Cactaceae) : a revision », article publié dans la revue Haseltonia, 2 :20-46. Plus de dix ans plus tard, la nomenclature de David Hunt (The New Cactus Lexicon, 2006) considère toujours ces spécimens comme une sous-espèce de parviflorus. Mais aujourd’hui, pour un grand nombre de botanistes, terrae-canyonae ne devrait pas être une appellation, ni même un taxon. Avec la meilleure compréhension que l’on a du genre Sclerocactus et la connaissance de la grande variabilité de son espèce parviflorus dontl’aire de répartition est très vaste, les spécimens de terrae-canyonae sont considérés comme une simple population de parviflorus.

Les parviflorus montrant des fleurs jaunes n’ont rien d’exceptionnel en Utah. Avant la construction du barrage de Glen Canyon qui amena la création du lac Powell, ils étaient très nombreux sur le plateau Rainbow, dans la Réserve Indienne Navajo. De très nombreux spécimens, non seulement à fleurs jaunes mais également à fleurs blanches ou roses blanchâtres, se répartissaient dans les zones les plus basses du Glen Canyon et de ses canyons secondaires. Tous ces spécimens ont été noyés sous les eaux du barrage. Et le lac Powell est un immense plan d’eau. Au regard du passé, il ne reste donc que peu d’exemplaires dont le nombre, de plus, a toujours été réduit dès que l’on quittait les zones basses de ces canyons.

Sur le site efloras.org, le nom terrae-canyonae n’apparaît que dans l’historique des descriptions qui ont concerné au fil du temps l’espèce parviflorus. Les fleurs de ces parviflorus y sont décrites succinctement : forme en entonnoir ou en clochette, pétales avec une bande médiane verdâtre à brunâtre et des marges de couleur rose à pourpre, jaune ou blanche. La couleur rose à pourpre est la plus souvent rencontrée, plus rarement la couleur blanche ou jaune. Jamais très vive, la couleur jaune de ces terrae-canyonae est bien différente de la couleur crème ou ivoire, parfois jaune blanchâtre, des Sclerocactus whipplei. L’aire de répartition de ceswhippleiest aussi différente. Hormis donc la couleur de leurs fleurs, la morphologie des tiges et des côtes de ces terrae-canyonae et, plus encore, leur couverture d’épines, s’apparentent à celles de l’espèce parviflorus.

Comme les parviflorus, ces terrae-canyonae sont des cactées de grande taille au sein du genre Sclerocactus (stricto sensu). Les tiges des spécimens âgés peuvent atteindre 40 à 50 cm de hauteur pour près de 15 cm de diamètre. La photographie ci-dessus montre un spécimen observé à Fry Canyon (Utah), bien protégé sous les rameaux d’un genévrier vieillissant, et dont la tige mesurait plus de 45 cm de longueur (ce qui n’est qu’une estimation compte tenu de la difficulté à l’approcher et à en mesurer correctement la longueur de tige !).

Ces spécimens à fleurs jaunes ont une répartition limitée à l’extrême sud-est de l’Utah, dans le comté de San Juan, ainsi qu’à l’extrême nord des comtés de Coconino et de Navajo, en Arizona, comtés qui sont en frontière avec l’Utah. En Utah, ils se rencontrent entre 1800 et 2300 mètres d’altitude, depuis l’environnement du Natural Bridges National Monument (concentration de ponts naturels de pierre creusés par l’érosion de l’eau, dont certains mesurent 60 à 80 mètres et sont parmi les plus longs rencontrés sur la planète) jusqu’aux rives sud de la rivière San Juan, au-delà de sa confluence avec la rivière Colorado. Les plus nombreux s’observent au nord de cette zone, particulièrement dans le secteur de Fry Canyon situé à seulement une douzaine de kilomètres à l’ouest du Natural Bridges National Monument.

Pour une description plus complète et technique, on pourra se rendre sur le site de Flora of North America.

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