Démarrage de végétation / floraison

Le but de cette page est de présenter un suivi sur deux mois, février et mars 2015, du démarrage de végétation et, sauf imprévu, de la floraison de trois spécimens de Sclerocactus et d’un spécimen de Pediocactus en culture :

Un S. brevispinus (semis de 2003, graines MG sous le nom de S. wetlandicus ssp. ilseae), un S. glaucus SB 141 (comté de Mesa, Colorado), semis de 2003 (gaines Köhres), tous deux en culture sur leurs propres racines, un S. mesae-verdae cultivé sur greffe, d’origine Uhlig. Ce spécimen âgé (dates estimées de semis et greffe avant 2003) a vu son porte-greffe se lignifier avec le temps et s’apparenter à un tronc racinaire, et un Pediocactus bradyi ssp. winkleri (semis de 2005, graines MG) en culture sur ses propres racines.

Dernière semaine de janvier / 1ère semaine de février 2015. Les premiers spécimens à montrer une entrée en végétation ont été Pediocactus bradyi ssp. winkleri et Sclerocactus brevispinus. Cette entrée en végétation s’est manifestée par l’apparition de boutons floraux pointant à l’apex du winkleri dès la fin de la dernière semaine de janvier, suivie par l’apparition de boutons floraux sur le brevispinus au cours de la première semaine de février. Les premiers boutons floraux n’apparaissent sur glaucus qu’au 10 février, date à laquelle se devine la formation de boutons floraux pour mesae-verdae. Mais ces derniers ne sont pas très visibles, encore très enfoncés dans l’apex. Aucune montée d’épine observée sur les aréoles de tous ces spécimens durant la première semaine de février. Tous ces spécimens sont sans arrosage depuis mi-septembre 2014. Spécimens conservés en serre avec pourcentage d’humidité évoluant en fonction de la météo entre 45 et 75% et température d’hivernage évoluant entre 4° et 12°C.

15 février 2015 : Premières photographies.

0215brevispinus

0215glaucus

Le brevispinus montre très distinctement sept boutons floraux. On note sur ce spécimen l’émergence très nette de nouvelles épines sur une aréole. Le glaucus montre trois boutons floraux et on remarque la montée de cinq à six pointes d’épines sur une de ses aréoles. Quatre boutons floraux sont désormais visibles sur le mesae-verdae, mais ils sont à peine visibles, encore bien protégés dans le creux de 0215mesae-verdae0215winkleril’apex. Le winkleri montre cinq boutons floraux. L’apparition et la montée de ces boutons floraux s’accompagnent sur chacun de ces quatre spécimens d’une croissance des tissus de leur tige autour de leur apex, tissus bien apparent d’une couleur vert clair qui tranche nettement avec celle plus bleutée de leur tige.

02-22-glaucus02-22-brevispinus

22 février 2015. Semaine écoulée froide, peu ensoleillée, temps couvert avec de la pluie. Arrosage différé. Les boutons floraux ont néanmoins pris du volume sur les quatre spécimens. Principalement sur le mesae-verdae sur lequel six boutons sont désormais bien apparents et émergent plus nettement de l’apex. La croissance des tissus autour de son apex est aussi bien marquée, ce qui n’était pas visible il y a une semaine auparavant.

02-22-winkleri02-22-mesae-verdae

Les boutons floraux du brevispinus continuent à prendre du volume et s’accompagnent d’une forte émergence des épines sur quatre aréoles. Les cinq boutons floraux du winkleri ont gagné aussi en rondeur. Seul le glaucus semble un peu en retrait, avec moins de volume pris par ses trois boutons floraux et une émergence plus lente de ses nouvelles épines apparues il y a une semaine.

03-02-glaucus

03-02-brevispinus

 02 mars 2015. L’arrosage de ces spécimens, envisagé dans le cours de la semaine écoulée, a été annulé. Les journées ont été encore froides, humides ou pluvieuses. Trop de risques, même en serre. Malgré un ciel couvert et trop peu de soleil, les boutons floraux sont devenus plus apparents sur chacune de ces cactées. A commencer par ceux du glaucus qui émergent à présent plus nettement de l’abondante feutrine des jeunes aréoles. On remarque aisément les nouvelles épines émergentes.

03-02-mesae-verdae03-02-winkleriSur le brevispinus, on aperçoit désormais devant chaque bouton floral les pointes bien apparentes du faisceau des nouvelles épines. Les six boutons floraux du mesae-verdae sont à présent bien visibles. Ils ont encore gagné en volume et ils émergent plus nettement de l’apex, tout comme les cinq boutons floraux portés par le winkleri.

 

03-09-brevispinus03-09-glaucus

09 mars 2015. Premier arrosage de l’année pour tous ces spécimens le samedi 7 mars. La semaine écoulée a été très ensoleillée. J’ai surpris, dès le mardi 3, un lézard se prélasser au soleil sur l’un des rebords de la serre, signe d’un temps de printemps précoce cette année ! Pour preuve, la montée progressive des températures avec une grande amplitude : proches du 0°C les nuits, voisines des 17°C au plus fort des journées. Dans leur habitat, Sclerocactus et Pediocactus connaissent ces amplitudes de températures, et des plus fortes encore. Pour ces spécimens en serre, une amplitude à l’identique : 6 à 7°C les nuits et jusqu’à 22°C les après-midi.

03-09-winkleri03-09-mesae-verdae

Les photographies montrent à présent sur tous les spécimens des boutons floraux émergeant nettement de l’apex. Ceux des brevispinus et mesae-verdae ont particulièrement pris de l’ampleur. On peut aussi observer la forte émergence de jeunes épines sur les nouvelles aréoles des trois Sclerocactus. Peut-être des premières fleurs sur le point de s’ouvrir  en fin de semaine ?

03-16-glaucus

03-16-brevispinus

16 mars 2015. Le premier arrosage du 7 mars (qui a fait suite au dernier de 2014, fin septembre) a été bénéfique à ces spécimens, pas au point cependant de déclencher leur floraison. En cause non pas tellement un ciel souvent voilé, mais bien davantage un air extérieur encore trop froid. Dans une serre plus largement aérée (durant les journées) que les semaines précédentes (aération toujours renforcée après un arrosage), l’air trop frais n’y a pas permis la montée des températures espérée.

03-16-mesae-verdae

03-16-winkleri

On remarquera que la presque totalité des boutons floraux des Sclerocactus se sont allongés (dimension tépales / pétales) alors que les boutons floraux du Pediocactus winkleri ont conservé leur rondeur. Autre détail à remarquer sur les quatre spécimens : la dimension désormais prise au sommet des tiges par leur zone apicale (formation et émergence de nouvelles aréoles avec faisceaux de jeunes épines et accompagnée ou non de bouton floral), zone dont la surface se trouvait réduite du fait du repos végétatif.

03-23-brevispinus03-23-mesae-verdae

23 mars 2015. Les trois spécimens de Sclerocactus sont désormais en fleur. Le brevispinus et le mesae-verdae depuis le 18 mars dans l’après-midi, et le glaucus depuis ce 23 mars, à la mi-journée. Les conditions de luminosité et de chaleur ont été encore difficiles à réunir la semaine passée (alternance de temps ensoleillé, nuageux, pluvieux), retardant en particulier le début de floraison du glaucus. Situation inchangée pour les boutons floraux du Pediocactus bradyi ssp. winkleri.

03-23-glaucus03-23-winkleri

L’ouverture de plusieurs fleurs sur une tige est toujours spectaculaire, surtout sur des cactées de petites tailles comme ces Sclerocactus. Trois fleurs ouvertes dans un même temps sur le brevispinus (sur un total de sept boutons floraux). Diamètre fleur de l’ordre de 1,7 cm pour une hauteur de presque 2 cm. Quatre fleurs ouvertes en même temps sur le mesae-verdae (sur un total de six boutons floraux). Hautes de quelques 2,5 cm, ces fleurs de mesae-verdae  montreraient un diamètre de 3,5 à 4 cm si elles pouvaient s’ouvrir largement. Pressées les unes contre les autres, elles forment un bouquet de 5 cm de diamètre alors que la tige de ce mesae-verdae mesure 5,5 cm de diamètre, épines comprises. L’unique fleur ouverte sur le glaucus montre un diamètre de 1,5 cm pour une hauteur de 1,8 cm.

03-30-brevispinus03-30-glaucus

30 mars 2015. La semaine écoulée a vu malheureusement prédominer ciel gris et nuages apportant des pluies éparses et répétées, les températures en serre ne dépassant 15/16°C.  La faible luminosité n’a pas permis le large épanouissement de toutes les fleurs. C’est bien dommage. Les photographies montrent déjà quatre fleurs fanées sur le brevispinus comme sur le mesae-verdae. Les trois fleurs restantes du brevispinus, qui montrent des couleurs moins vives au fil des jours, restent cependant assez ouvertes. Ses fleurs apparaissent moins sensibles à une faible luminosité alors que la dernière fleur du mesae-verdae ne peut s’ouvrir largement en l’absence d’un ciel plus lumineux.

03-30-mesae-verdae

03-30-winkleri

Sensible également à la faible luminosité du ciel, la seule fleur du glaucus ouverte semaine passée est demeurée fermée comme le montre la photographie. Il reste sur ce glaucus, comme sur le brevispinus, deux boutons floraux encore à s’ouvrir, lesquels, on peut l’espérer, permettront de voir prochainement des fleurs enfin largement ouvertes. La formation très lente des boutons floraux du Pediocactus bradyi ssp. winkleri marque une étape. La forme très ronde qui les caractérisait va désormais s’allonger au fil des jours à venir. A noter l’émergence à présent très visible des faisceaux d’épines sur les nouvelles aréoles.

04-07-brevispinus04-07-glaucus

07 avril 2015. Un début de semaine très nuageux et froid, et (enfin !) une fin de semaine très ensoleillée qui a accéléré les floraisons. Cependant, la dernière fleur du mesae-verdae ne s’est jamais pleinement ouverte et s’est brusquement fanée le 2 avril. Depuis son entrée en végétation en février, ce spécimen de mesae-verdae à produit de fortes épines qui protègent désormais très efficacement son apex. Une seule fleur est demeurée ouverte (3 cm de diamètre) sur le brevispinus. J’ai noté que les fleurs de ce brevispinus demandent moins de luminosité et de chaleur pour s’épanouir pleinement que les fleurs du spécimen de glaucus qui nécessitent un couple luminosité-chaleur plus intense.04-07-mesae-verdae04-07-winkleri

La première fleur du winkleri s’est ouverte le 5 avril en fin de matinée (largement ouverte = 2,2 cm de diamètre), suivi par une seconde entrouverte en milieu d’après-midi sous l’effet de la montée des températures. Les couleurs rose-orangé de ces fleurs de winkleri sont très changeantes. A peine cinq heures de temps séparent l’ouverture des deux fleurs ici photographiées. Dès leur ouverture, il faut essayer d’en capter le plus grand nombre possible de nuances.

04-12-glaucus04-12-brevispinus12 avril 2015. Semaine chaude, ensoleillée, contrastant fortement avec les deux semaines précédentes. Ces conditions climatiques ont bien sûr fortement impacté chaleur et luminosité dans la serre qui abrite les spécimens. Les dernières fleurs ouvertes se sont flétries, le 7 avril pour le brevispinus, le 9 avril pour le glaucus, et le 12 avril pour le winkleri. La photographie du brevispinus montre la formation d’au moins deux fruits suite à une pollinisation effectuée avec un autre spécimen de brevispinus également en culture.

Le tableau ci-dessous reprend, sur 4 années depuis 2012, les dates et durées de floraisons des spécimens de Sclerocactus et Pediocactus qui ont fait l’objet de ce suivi. Quatre remarques :

  • Les dates de premier arrosage peuvent varier bien évidement d’une année sur l’autre selon les conditions météorologiques rencontrées, ce qui n’est pas sans impact sur la formation des boutons floraux et les dates d’ouverture des premières fleurs.
  • Dans la mesure où les Sclerocactus fleurissent très tôt dans l’année (cf leur phénologie), les conditions climatiques rencontrées année après année qui peuvent être changeantes, instables ou perturbées à l’approche d’un changement de saison (printemps), peuvent plus fortement impacter les dates d’épanouissement de leurs premières fleurs (exemple, dates séparées de 2 semaines entre les années 2013 et 2014).
  • On note que le spécimen de Pediocactus bradyi winkleri voit ses premières fleurs s’ouvrir à des dates séparées de moins de 5 jours d’une année sur l’autre, dates qui couvrent la 1ère semaine d’avril.
  • Les durées de fleurissement peuvent être très variables, fonctions principalement des conditions climatiques rencontrées. Le nombre de fleurs peut aussi influer sur cette durée si les fleurs en nombre ne s’épanouissent que les unes après les autres. Mais comme le montrent les photographies ci-dessus, plusieurs fleurs s’épanouissent souvent en même temps, réduisant ainsi le temps de fleurissement. Mais c’est alors le spectacle de toutes les fleurs ouvertes qui y gagne.04-12-TabSuiviFlo

Ce tableau termine ce suivi du démarrage de végétation et de la floraison de trois spécimens de Sclerocactus et d’un spécimen de Pediocactus bradyi ssp. winkleri.

ScleroAventSignet02

Kenneth D. Heil (période 1990-2010)

Depuis la fin des années 1960, il est admis avec L. Benson (1966, A revision of Sclerocactus, CSJ 38 ; 1982, The Cacti of the United States and Canada) que tous les spécimens de Sclerocactus qui ne portent pas d’épines à pointe crochue et qui sont rencontrés dans le centre-ouest du Colorado, autour des villes de Grand Junction et de Montrose, ainsi que dans le nord-est de l’Utah aux alentours de la ville de Vernal, sont considérés comme espèce glaucus et portent tous le nom vernaculaire de Uinta Basin hookless cactus.

La situation de ce taxon va évoluer à la suite de la publication de listes de plantes particulièrement affectées par la dégradation de leurs habitats. Les unes sont menacées d’y être en voie d’extinction, d’autres s’y trouvent déjà, et d’autres encore sont éteintes. Après une première liste de 3100 plantes établie par l’Institut Smithsonian (1975), des listes émanant de divers organismes viennent s’ajouter à des pétitions qui attirent l’attention de l’U. S. Fish and Wildlife Service sur la situation critique de certaines d’entre elles, dont Sclerocactus glaucus. Ces actions débouchent sur le vote de l’Endangered Species Act du 11 octobre 1979. S. glaucus s’y trouve classée « Threatened », précisément « menacée d’être en voie d’extinction dans un proche avenir et dans tout ou partie de son milieu naturel », un classement qui précède le stade plus critique « Endangered », en voie d’extinction.glaucus-Pyramid-1473-2014

Si la dégradation d’une partie des habitats de ces plantes est dénoncée d’une manière générale et avec des origines diverses, une exploitation commerciale avec collecte souvent illégale de graines vient aggraver la situation d’un petit nombre d’entre elles. S. glaucus se trouve parmi celles-ci, ainsi que des cactées nouvelles qui lui sont proches morphologiquement, cactées découvertes au sein même de sa zone de répartition et dont les premières descriptions font rapidement l’objet de publications. Car, au cours de ces années 1980, Fritz Hochstätter a étudié cette espèce glaucus au Colorado et en Utah, et particulièrement dans la zone centrale du Bassin Uinta. Il s’est aperçu que des variantes, notables selon lui, existaient parmi ces glaucus, au point qu’il lui paraît nécessaire de publier plusieurs descriptions. Les premières, en 1989, portent sur S. wetlandicus (Succulenta (Netherlands) 68(6) : 123-126, f.) et, en 1993, sur S. wetlandicus ssp. ilseae (Succulenta (Netherlands) 72(2) : 86-92, f.). Le nom d’espèce est tiré du secteur géographique appelé Pariette Wetlands situé au nord-est de l’Utah et duquel proviennent les premiers spécimens observés. Le nom de sous-espèce reprend le prénom Ilse de l’épouse de F. Hochstätter.

wetlandicus-Pariette-0132-2011En 1994, S. wetlandicus ssp. ilseae est passée du rang de sous-espèce à celui d’espèce par Kenneth D. Heil et J.Mark Porter sous le nom de S. brevispinus (Haseltonia 1994. 2 : 26). Ils écrivent : « La répartition de S. brevispinus forme une bande de populations disséminées d’est en ouest. A l’extrémité ouest, les populations sont caractérisées par des plantes avec des tiges globulaires à sommet déprimé, de courtes épines radiales, absence d’épine centrale en position basse (crochue), et possédant des fleurs très courtes, de forme tubulaire, de couleur rose pâle. A l’extrémité est, quelques populations apparaissent comme des formes grandement introgressées (introgression = échange de gènes – ici de manière naturelle – avec une autre espèce compatible) et ne peuvent être techniquement considérées comme des S. brevispinus ». Il s’agit, à cette extrémité orientale, de spécimens de S. wetlandicus. wetlan-brevi-1358-2014Pour ces botanistes, S. brevispinus s’en distingue suffisamment par sa morphologie, par ses fleurs tubulaires (forme évasée en entonnoir chez wetlandicus) et par ses épines centrales et radiales toujours de faible dimension ne dépassant pas 0,5 à 1 cm (contre 2 à 3 cm), d’où le nom de brevispinus, dérivé du latin brevis, bref, court, et de spina, épine.

Or, les secteurs géographiques dans lesquels poussent ces cactées, surtout S. brevispinus, intéressent de plus en plus la recherche pétrolière et gazière pour la richesse de leur sous-sol. Face à une exploitation énergétique rapide qui s’apprête à bouleverser une partie du nord-est de l’Utah, des organismes comme l’Utah Native Plant Society adressent alors en 2005 à l’U. S. Fish and Wildlife Service une pétition demandant de reconnaître officiellement et séparément ces espèces wetlandicus et brevispinus comme « Threatened » et de ne plus les inclure sous le seul nom de glaucus. Des propositions allant dans le même sens ont d’ailleurs émané de la 10e session du Comité pour les plantes de la CITES (Convention sur le Commerce International des Espèces de Faune et de Flore Sauvage menacées d’Extinction, PC.10.9.2, 15 décembre 2000).

L’U. S. Fish and Wildlife Service va s’appuyer principalement sur les publications de F. Hochstätter et sur les études de botanistes tels que Kenneth D. Heil et J. Mark Porter pour décider de la division de cette espèce glaucus en trois espèces distinctes. Or, une espèce (végétale) ne répond pas à une définition universelle, mais à plusieurs définitions qui utilisent des critères principalement descriptifs (morphologie) mais aussi écologiques (géographie, sol,…), temporels (cladistique), génétiques (isolement sexuel, non hybridation). La morphologie n’étant pas décisive, on a recours aux études phylogénétiques moléculaires des séquences d’ADN. Certes, ces études ne contribuent pas directement à l’objectif de division d’une espèce en plusieurs autres, tant sont bien évidemment minimes les différences génétiques entre elles. Mais, comme le souligne Root Gorelick du Département de Biologie de l’Université d’État d’Arizona (DNA sequences and cactus classification – a short review, Bradleya, 20/2002), les informations provenant de ces séquences d’ADN sont à même d’apporter aux botanistes des informations nouvelles et complémentaires à la botanique traditionnelle sans être destinées pour autant à engendrer une classification ultime de toutes les cactées. Ces études ont pour finalité de déterminer l’histoire évolutive des espèces et d’établir les relations de parenté qui peuvent exister entre elles.Pariette-1308a-2014

Une étude phylogénétique va apporter des résultats étonnants sur les relations qui existent non seulement entre les espèces du genre, mais au-delà de celui-ci, en mettant à jour des liens forts qui rattachent le genre Toumeya et son espèce monotypique papyracanthus au genre Sclerocactus (Kenneth D. Heil et J. Mark Porter, 2000, Relationships between Sclerocactus and Toumeya (Cactaceae) based in chloroplast trnL-F sequences, Haseltonia 7 :8-23). Et les résultats obtenus pour les espèces glaucus, wetlandicus, brevispinus, sont particulièrement observés. Pour le Flora of North America Editorial Committee (vol. 4, 2004), si « les « analyses phylogénétiques des séquences d’ADN (J.M. Porter et al, 2000) apparaissent ambiguës quant à la plus étroite parenté que pourrait avoir S. wetlandicus » avec une espèce du genre en particulier, elles permettent de dire que « cette espèce est néanmoins apparentée à S. brevispinus, S. glaucus, S. wrightiae, S. whipplei et S. parviflorus ». Concernant S. brevispinus à la morphologie et aux dimensions d’épines jugées proches de celles de S. mesae-verdae, Flora of North America rapporte que « les analyses phylogénétiques des séquences d’ADN (J.M. Porter et al, 2000) viennent appuyer une ascendance plus étroite avec S. whipplei, S. cloverae (=S. whipplei ssp. heilii), S. glaucus, S. parviflorus, S. wetlandicus et S. wrightiae, qu’avec S. mesae-verdae ».

glaucus-Pyramid-0349-2014Jusqu’où est-on allé dans cette exploration génétique du genre Sclerocactus stricto sensu ? Jusqu’où peut-on aller dans la mesure où, comme l’indique Root Gorelick, les séquences d’ADN recèlent des mécanismes et des rythmes d’évolution encore incompris aujourd’hui ? Et surtout, jusqu’où veut-on aller ? Si, dans cette première moitié des années 2000, des relations de parenté sont clairement établies entre Sclerocactus stricto sensu, on ne peut déterminer de liens plus forts ou exclusifs qui rattacheraient certaines espèces à l’intérieur de ce genre.

Dès 2004, S. brevispinus est reconnue comme nouveau taxon par les botanistes Kenneth D. Heil et J. Mark Porter pour lesquels « la combinaison de côtes arrondies, de courtes épines, et de petites fleurs roses font que S. brevispinus est aisément identifiable… » (Flora of North America Editorial Committee, vol.4). Pour le botaniste S. L. Welsh, S. brevispinus est un nouveau taxon mais sous le nom de Sclerocactus whipplei var. ilseae (Welsh et al, A Utah Flora, 4th Edition. 2008). Et en septembre 2009, l’U.S. Fish and Wildlife Service, ainsi que l’organisme Flora of North America, séparent l’espèce glaucus en trois espèces distinctes, toutes classées « Threatened » : S. brevispinus (Pariette cactus), S. wetlandicus (Uinta Basin hookless cactus) et S. glaucus (Colorado hookless cactus). Ces appellations qui s’accompagnent chacune d’un nom vernaculaire précis s’appuient également, ce qui est important, sur des aires de répartition distinctes. Si S. brevispinus voit son territoire limité à un petit secteur appelé Pariette Draw dans la partie centrale du Bassin Uinta, S. wetlandicus se répartit plus largement dans ce même Bassin alors que S. glaucus ne se rencontre que dans une partie du centre-ouest du Colorado. Cette espèce glaucus devient alors endémique du Colorado.Repart1-BreviGlauWet

Kenneth D. Heil va aussi travailler sur Sclerocactus sileri. Il est admis aujourd’hui que le premier spécimen a été très vraisemblablement découvert en 1888 par Andrew Lafayette Siler (1824-1898) (voir Histoire du genre, partie « N.L. Britton et J. N. Rose (période 1922-1950) ». Cette cactée a été rangée dans le genre Sclerocactus en 1969 par Lyman D. Benson sous le nom de S. pubispinus var. sileri (Cacti of Arizona, ed.3: 23, 179). Puis avec K.D. Heil, en 1994, elle va devenir pour la première fois espèce à part entière, Sclerocactus sileri (Haseltonia. 2 :39), avant de redevenir sous-espèce, renommée Sclerocactus whipplei ssp. busekii en 1995 par Fritz Hochstätter dans la revue Succulenta (74 (1) :38-44). Le nom de sous-espèce donnée par Hochstätter honore un cactophile tchèque, Josef Busek (Cactus Explorer (2): 45. 2011).

glaucus-Pyramid-1479-2014 Pour Hochstätter, ce nouveau nom traduit les difficultés à différentier nettement selon lui et à l’époque tous les traits morphologiques de ces spécimens de ceux des Sclerocactus spinosior implantés plus au nord et des Sclerocactus whipplei répandus plus à l’ouest. Il voit cependant dans la couverture d’épine de ces busekii, dans la présence d’une épine centrale assez proche dans sa forme de celle typique aux whipplei, dans la morphologie des fleurs et aussi dans quelques aspects de leur phénologie, plus de ressemblances avec Sclerocactus whipplei (Cactaceae-Review IRT, Vol.9, 1, 2006).

En fait, au cours de ces années 1990-2000 et en fonction de leurs lieux de collecte, de nombreux spécimens dits de « busekii » vont s’avérer être plus ou moins des spécimens hybridés avec l’espèce parviflorus dont la répartition vient au contact de celle de l’espèce « pure » sileri. Dans le secteur aujourd’hui protégé du Vermilion Cliffs National Monument, l’espèce « pure » sileri se cantonne encore et seulement dans des espaces étroits et en altitude, alors que les spécimens aux alentours, hybridés, ne présentent plus véritablement les caractéristiques morphologiques propres aux sileri.

ScleroAventSignet02

Sclerocactus brevispinus


Sclerocactus brevispinus
présente une tige globulaire à courte cylindrique, ovoïde sur les plantes juvéniles puis devenant plus aplatie au niveau de l’apex sur les plantes adultes, ne dépassant pas 10 cm de hauteur sur les spécimens âgés pour 7 cm de diamètre. L’espèce est de plus petite taille que l’espèce wetlandicus. Au nombre d’une dizaine par aréole, les épines ne masquent pas la tige.

1400i-5827c-Dorde-113Les épines centrales au nombre de 1 à 3 par aréole sont composées d’1 épine dirigée vers le bas de la tige (mais elle peut être absente), droite ou légèrement arquée avec pointe assez recourbée presque en forme d’hameçon, de couleur jaune paille ou un peu brunâtre ou rougeâtre, longue jusqu’à 0,5 cm, et de 2 épines (mais qui peuvent être réduites à une seule ou être absentes) pointant perpendiculairement ou presque à la tige, de même couleur que les précédentes, toujours droites, d’une longueur inférieure à 0,5 cm.Brevispinus1667-2010-JBotaSLC

Brevispinus1483-2009-JBotaSLCIl n’y pas d’épine centrale pointant nettement vers l’apex. Les épines radiales blanches à grisâtres, au nombre de 6 ou 7 par aréole mais pouvant aller jusqu’à 13, longues de 0,5 à 1,5 cm, sont habituellement disposées en rayons.

Les fleurs diurnes, apicales, de forme tubulaire ou très légèrement évasée, non odorantes, sont de couleur pourpre. Les fruits de forme ovoïde à courte cylindrique, de couleur ocre verdâtre, longs de moins de 2 cm, sont irrégulièrement déhiscents. La floraison s’étale d’Avril à Mai dans son habitat.

Pour une description plus complète et technique, on pourra se rendre sur le site de Flora of North America.

Dia-Epines-brevispinus2

ScleroAventSignet02